AMD s'attaque aux pratiques commerciales du leader Intel (PAPIER GENERAL)
   Par Amandine AMBREGNI
  
   NEW YORK,
28 juin 2005 (AFP) -  Le fabricant de micro-processeurs AMD a lancé mardi une offensive contre son grand rival Intel, ouvrant la brèche, avec sa plainte pour abus de position dominante, à une remise en question du modèle commercial pratiqué par le leader mondial du secteur.
   Dans une plainte déposée dans le Delaware (est), AMD accuse Intel d'avoir usé de moyens déloyaux pour contraindre
38 sociétés --12 fabricants d'ordinateurs, 9 distributeurs et 12 détaillants-- à des liens d'exclusivité ou de quasi-exclusivité.
   Le numéro deux mondial des puces pour ordinateurs--avec plus de
15% du marché, contre 80% pour Intel, selon le cabinet Info-Tech Research-- a listé sept types de "pratiques illégales" courantes chez son concurrent.
   Est notamment incriminée la manière dont Intel "force ses principaux clients Dell, Sony, Toshiba, Gateway et
Hitachi à des accords d'exclusivité en échange de ristournes en cash, de prix discriminants ou de subventions marketing", selon un communiqué d'AMD.
   "Que ce soit via des prix plus élevés ou des bénéfices monopolistiques, un moindre choix sur le marché comme des barrières à l'innovation, les consommateurs d'Osaka jusqu'à Francfort en passant par
Chicago paient le prix tous les jours des abus de position dominante d'Intel", a martelé le pdg d'AMD Hector Ruiz, qui table sur un procès "avant la fin 2006".
   Intel s'est dit en "profond désaccord" avec ces accusations. "AMD a choisi une fois de plus de se plaindre devant un tribunal des succès d'Intel, avec un dossier rempli de spéculations", a indiqué un porte-parole, Tom Beerman.
   "Intel répondra de manière appropriée" devant le tribunal, a-t-il ajouté dans un communiqué.
   La position de leader d'Intel est établie depuis des années, ce fabricant étant le partenaire privilégié de Microsoft, dont les systèmes d'exploitation équipent plus de
90% des ordinateurs personnels dans le monde. Mais Intel a également verrouillé sa domination en pratiquant un système de subventions et de ristournes contre de l'exclusivité.
   Selon Carmi Levy, analyste chez Info-Tech Research, AMD profite d'un climat défavorable à Intel, qui a été épinglé par les autorités japonaises de la concurrence, et dont les pratiques commerciales sont aussi scrutées de près à Washington et à Bruxelles.
   La Japan Fair Trade Commission (JFTC) a récemment reproché à Intel de faire pression sur cinq constructeurs d'ordinateurs avec son système de subventions et de ristournes.
   Ses versement d'argent à Sony ont en l'occurrence fait chuter les parts de marché d'AMD avec ce constructeur de
23% en 2002 à 0% aujourd'hui, assure AMD.
   D'une manière générale le numéro deux mondial des semi-conducteurs a vu ses parts de marché se dégrader ces quatre dernières années. "Ils essaient d'enrayer cette érosion en regagnant ce qu'ils peuvent dans un tribunal", poursuit M. Levy.
   "Cette plainte est assurément symbolique, un petit acteur s'en prenant aux pratiques du plus gros", souligne encore cet expert. "Il sera intéressant de voir si le modèle des subventions, pratique courante dans le commerce, sera remis en question, car il est évidemment plus facile de pratiquer ces subventions lorsque vous êtes un acteur important".
   D'après l'universitaire Nicholas Economides, spécialiste des questions de concurrence, "ce cas ressemble à l'affaire LePage contre
3M (matériel de bureau), lorsque la Cour suprême a tranché en 2003 contre les pratiques de ristournes en échange de liens d'exclusivité pratiquées par ce dernier".
   Pour Intel, les ennuis sérieux ne semblent pas pour autant pour demain. La bataille s'annonce longue pour AMD, juge Amrit Tewary, de Standard and Poor's, en soulignant que pour étayer son dossier le groupe va devoir réussir à convaincre Dell ou Sony de venir témoigner au tribunal contre Intel.